À Toi

Ode à mon père, que je relis avec toujours autant d’émotion.

Ode à toute cette relation complexe, aimante et turbulente qui fut la nôtre

Ode à ce lien qui put être difficile entre nous

La résilience est là aussi, nécessaire pour avancer.

Aimer ou continuer à se tourmenter.

                                                                                                            À TOI 

   Bonne fête à toi dans les étoiles. 

Vingt ans déjà...

J'ai ressorti pour l'occasion quelques  Polaroïd et autres vieux clichés tirés d'argentique qui montrent le papa amour, le papa tendresse que tu as été.

 Le papa facétieux, le papa sérieux aussi, grand scientifique que tu étais et dont j'ai toujours été si fière..

Grâce à toi j'ai baigné dans l'ouverture du monde si cosmopolite qui fut le tien. 

J'ai franchi des volcans, j'ai mesuré des séismes et tant rêvé quand tu me racontais le ciel et les étoiles. 

C'était nos soirées, notre moment, notre instant sacré. 

Tu m'as appris l'art du débat, tu m'as toujours incité à défendre mon opinion et à étayer ma réflexion.

 Tu m'as appris à chercher dans le dictionnaire, à avoir le goût d'apprendre encore et toujours, à être curieuse, à être ouverte d'esprit, à ne pas apprendre par cœur mais à comprendre  pour réciter avec mes mots. 

Tu m'as appris à regarder, à contempler, à avoir ce regard du photographe qui scrute et qui s'émerveille, qui dénonce aussi parfois. 

Tu m'as appris les saveurs, les odeurs, et le goût de la bonne cuisine que l'on invente, encore et encore, bien loin des livres de recettes. 

Tu m'as appris à inventer, à créer, à imaginer, à déborder, à sortir de ce cadre si ennuyeux des convenances si convenues et si consensuelles de ce monde. 

Tu as su me regarder avec tant d'amour et de bienveillance qu'à mon tour j'ai ces yeux pleins de tendresse pour ceux que j'aime et qui m'entourent. 

Tu m'as appris à me rebeller et tu en as brûlé tes ailes, mais tu m'as donné ce goût de la révolte qui m'aide aujourd'hui à m’insurger contre les inégalités,à rouspéter, à tempêter et, parfois, à faire avancer ce monde du tout petit pas qui est le mien. 

Tu m'as appris des jeux de mots laids que mes amis supportent encore aujourd'hui, tes calembours tirés par les cheveux qui me faisaient lever les yeux au ciel, mais aussi et surtout, surtout, à savoir rire de tout et avant tout de soi même. 

C'était ton credo. 

C'est devenu le mien.

 Ton esprit caustique et tes mots acérés sont aussi devenus miens certains jours. 

Tu n'as en revanche jamais réussi, à ton grand dam , à faire de moi une matheuse, une scientifique, une collectionneuse de timbres, de vieilles pièces ou de je ne sais quoi, toi qui aimais tant cela et gardais tout.

 Une dessinatrice non plus malgré tes efforts pour m'apprendre l'art de la perspective et du tracé habile qui était le tien. 

Mais tu as contribué à faire de moi la femme que je suis aujourd'hui et pour cela je te dis merci. 

Tu as façonné de tes mains la rêveuse, l'imaginative, la bienveillante et la moqueuse,

 la battante, la fragile qui se dépasse et devient de plus en plus forte grâce à ses failles, l'aimante, la joyeuse qui aime tant rire et amuser son entourage, la pas sérieuse qui se gausse de tant de choses pour ne pas en pleurer parfois, la cynique et la sarcastique,

 la souriante qui cache ses peines, l’amoureuse de la vie et de la nature qui étreint les arbres et hume le parfum des fleurs. 

Tout cela , c'est un peu comme cette belle statue africaine que tu as sculptée un jour et que j'aimais tant , avec ses arrondis et ses aspérités. 

Tout cela c'est moi. 

Tout cela vient de toi. 

Je t'aime. 

16 juin 2019 

Valérie Rossignol.